Le pays koulango connaît une mutation musicale depuis le milieu des années 2000. Les chanteurs traditionnels épousent l’ère de la modernité pour éviter d’être happés par une génération de jeunes talents « envahissants ».
Comme les pays baoulé et attié, connus pour leurs musiciens traditionnels, le Zanzan avait les siens. Après le décès du talentueux Kobenan Kouman, la relève a été faite par ses épigones Ouattara Korotoum, Kobenan Diguida, Koko Assouman, Legros…
Les thèmes abordés dans la musique traditionnelle koulango tournent autour de la mort (piikô), la maladie (yangô), la haine (tchiyo), la malchance (yédjiago), la souffrance (bohogo) et l’amour (koridjo). Les musiciens chantaient donc rarement dans les moments de réjouissance. Ils se déplaçaient, le plus souvent, suite à un décès.
Les instruments
Une ou 2 guitares rudimentaires, une bouteille et une caisse constituaient l’essentiel des instruments. L’orchestre, composé de 3 personnes au plus. Sollicités pendant les moments de tristesse, ces chanteurs donnaient à réfléchir sur la condition humaine.
L’émergence des jeunes
Dans le Zanzan, les musiciens traditionnels ont marqué les décennies 1970 ; 1980 et 1990. Aujourd’hui, ils sont contraints d’être en phase avec la modernité. Pour ne pas tomber dans l’oubli. Des jeunes ont « miné » le terrain avec des instruments modernes. Puisant dans les chansons des Anciens, ils connaissent une ascension fulgurante depuis les années 2000. La langue restée la même : le koulango. Idem au niveau des thèmes.
Dans le département de Bondoukou, on doit à Sié Charles (1er jeune chanteur « tradi-moderne ») la profusion des nouveaux musiciens. Depuis la sortie de son 1er album, en 2005, nombreux ceux qui frappent aux portes de Son Digital du Zanzan (SDZ), son studio d’enregistrement. Tout passe par le jeune homme. De la programmation au mixage. En passant par l’arrangement et l’enregistrement. Il est aussi producteur et distributeur.
Dans son sillage, Ernest Ajamadjo, Roger Kouakou, Sylvanus, Zoum Lépé,… : pour les hommes. Et Awa Kouman, Ama Marie, Tantie Henriette, Adjoumani Sévérine, etc. : pour les femmes. Mais le marché est étroit et saturé pour ce monde. Rude, la bataille pour la reconnaissance. Les productions étant destinées pour une consommation d’abord locale. On ne manque pas d’ingéniosité. Outre les chefs-lieux de département, ces artistes sillonnent villages et hameaux pour vendre eux-mêmes leurs disques. Certains vont dans les autres villes du pays, notamment à Abidjan, à l’invitation des ressortissants du Zanzan.
Fortement teintée de modernisme, cette musique régionale a l’avantage d’être festive. Les occasions ne manquent donc pas pour vendre les prestations. Lors des fêtes surtout. Pendant lesquelles les chanteurs sont sollicités pour égayer les soirées.
Les Anciens se sont adaptés à la nouvelle donne. Ils essaient de sortir la tête de l’océan de jeunes talents. Comme pour confirmer que l’artiste ne meurt jamais. Car échappant à l’usure du temps.
OSSÈNE OUATTARA