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dimanche 6 octobre 2024
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BONDOUKOU : Le monde paysan s’invite dans le débat des élections régionales

Pété Bini Yao est le président de la Mutuelle technique agricole du Zanzan (MUTAZA). A ce titre, il est le porte-parole du monde paysan du Gontougo. Après les incidents de Bondoukou, le dimanche 16 décembre, monsieur Pété fait des précisions et interpelle la direction du PDCI, son parti. Entretien.

Pété Bini Yao, porte-parole des paysans du Gontougo, en conférence de presse, le mardi 18 décembre

Pété Bini Yao, porte-parole des paysans du Gontougo, en conférence de presse, le mardi 18 décembre

Le dimanche 16 octobre dernier, il s’est produit un incident à Bondoukou lors du choix du candidat du PDCI pour l’élection du Conseil régional. Que s’est-il exactement passé ?

C’est une affaire de société, et non une affaire politique. Je voudrais vous rappeler que de 1995 en 1999, je fus secrétaire du comité de base PDCI de Songori, mon village. Je suis un enfant de ce parti. J’ai été membre du MEECI à l’époque. Dimanche dernier, on m’a appelé de venir à la maison de notre parti parce que quelque chose se passait. Quand je suis arrivé, j’ai constaté une échauffourée : les jeunes, les femmes, les agriculteurs, tous les vieux étaient là. Et quand je me suis informé, ils m’ont dit qu’ils étaient rassemblés pour désigner le candidat du PDCI pour l’élection du Conseil régional.

Est-ce cela qui a failli mettre le feu aux poudres ou bien y a-t-il eu d’autres raisons ?

Depuis 2005, nous travaillons à cette élection. Vous savez, le Gontougo est une des régions les plus pauvres du pays. Elle est très en retard par rapport aux autres. Il fallait sauver la situation. Avant les élections présidentielles de 2010, nous avons demandé à tous les fils du Gontougo d’être unis pour conduire une seule liste à la Régionale. Pas de RDR, PDCI, FPI…Il faut une réconciliation entre nous-mêmes bien qu’il n’ait pas eu de guerre chez nous. Il fallait que chacun sacrifie ses intérêts personnels pour qu’ensemble nous unissions nos forces pour sortir notre région de sa situation précaire. Ce qui a été fait. Et maintes fois, nous avons présenté Babacauh Koffi Dongo comme le candidat de la région. Aucun chef traditionnel ne peut dire qu’il n’est pas informé.

Donc vous voulez dire que le professeur Babacauh a longtemps été choisi candidat par les populations du Gontougo ?

Bien sûr ! Avant les élections de 2010, Babacauh était sur le terrain. Nous avons dit qu’on doit travailler en famille. Cela sous-entendait que tous, Koulango, Dioula, Nafanan, Abron, Agni Bona, Lobi…, devaient être ensemble. Après les législatives, nous avons dit qu’il faut que le Conseil régional soit typiquement un symbole de développement afin d’aider tout le monde. Vous savez, avant l’arrivée du président de la République à Bondoukou, une igname se vendait à 1 000 FCFA. C’est-à-dire 5 ignames à 5 000 FCFA. Plus chère qu’à Abidjan. Il n’y avait pas de routes. Il a fallu le professeur Babacauh qui a déboursé de l’argent pour que la route Sorobango-Bondoukou soit réparée. Elle était en piteux état. C’est contre toute attente qu’on nous a annoncé que le ministre Adjoumani venait avec un cortège de près de 200 véhicules. Qu’il venait se faire investir candidat du PDCI. C’est inadmissible. Il n’avait vu personne, il n’avait travaillé avec personne. Babacauh avait déjà été désigné par les populations. S’il devait avoir des changements, il aurait fallu au moins des négociations. C’est-à-dire des discussions franches.

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D’où la colère des jeunes ?

Oui. Primo, monsieur Adjoumani est ministre des Ressources animales depuis l’ère Gbagbo. A Bondoukou, il a des fermes à lui. Mais demandez combien de poulaillers il a construit pour des jeunes ? Combien lui sont redevables pour les avoir aidés ? Secundo, s’exprimant publiquement sur le problème du manganèse de Bondoukou, Adjoumani a dit que s’il veut trop en parler, il risquerait son poste de membre de gouvernement. Il fait passer son intérêt personnel au-dessus de la souffrance de ses propres parents. Par ailleurs, les jeunes ont encore en mémoire le souhait du ministre de faire du département de Tanda une région, c’est-à-dire sa zone d’origine. Il sème la division entre les peuples du Gontougo. C’est la principale raison de la colère des jeunes.

Il y a d’autres raisons alors ?

La population en avait gros sur le cœur. Je ne suis pas contre le ministre Adjoumani chez qui j’ai dormi, avec qui j’ai mangé. Mais lors du séjour du Président de la République dans le Gontougo, il a tout fait pour empêcher que le chef de l’Etat reçoive les producteurs d’anacarde que nous sommes. Or la population de Bondoukou vit à 85% de la production de noix de cajou. Nous avons voulu rencontrer le Président pour lui exprimer nos problèmes. Adjoumani nous a empêchés. Entre temps, il a ouvert la porte aux cadres de Bondoukou. Rien que pour demander au Président de faire leur promotion. Comment peut-il demander nos suffrages ? Voilà aussi l’autre raison de la colère des populations. Pire encore, des cadres sont allés à la maison du PDCI pour dire que Bédié a choisi Adjoumani. Non, monsieur ! La population a choisi Babacauh. Ses frères lobi, koulango, malinké ; et tous les « cerveaux » de Bondoukou sont derrière lui.

 On a aussi appris que les jeunes qui ne veulent pas de la candidature du ministre Adjoumani étaient ceux-là même qui l’avaient soutenu dans ses moments difficiles. Est-ce vrai ?

C’est vrai. Quand le ministre Adjoumani était en froid contre le Président Gbagbo, ce sont les mêmes jeunes de Bondoukou qui se sont dressés contre le Président Gbagbo. Celui-ci a fini par reculer. Si aujourd’hui ces jeunes sont contre sa candidature, c’est que quelque chose ne va pas. Depuis 2005, nous avons commencé des projets agricoles, le désenclavement des routes. Et j’insiste sur le fait que toutes les routes que vous voyez à Bondoukou ont été tracées à l’époque où le professeur Babacauh était le directeur général de la CIDT. De la Volta noire jusqu’à Bouna, en sortant par Nassian, c’est Babacauh qui a permis d’avoir ces voies. Il faut reprendre tous ces projets : la culture du Soja, du maïs, du mil, de l’igname, les maraîchers, etc. Adjoumani n’est pas un technicien, c’est un politicien. S’il est candidat à la présidence du PDCI, nous le soutiendrons parce que c’est un politicien. Mais ici, c’est une affaire de technicien. Il a dit dans un Quotidien qu’il est un bon gagnant. Que s’il gagne, il cèdera son fauteuil à un autre. A quoi sert de gagner et céder son poste à quelqu’un qui ne maîtrise pas ton programme ?

 Mais il a été dit que la réunion a eu lieu et que le ministre Adjoumani a été plébiscité

La réunion n’a pas eu lieu. Quand il y a eu les échauffourées, le Préfet de police a fait fermer la porte de la maison du parti. Contre toute attente, nous avons appris qu’il était chez un ex-délégué longtemps démis pour cause d’indiscipline. Là-bas, il aurait été investi par des délégués. Quels délégués ? Le Préfet de police a dit que la réunion est reportée à une date ultérieure. Donc ce qui a été fait chez M. Kossonou est nul et de nul effet.

Il a également été dit que le professeur Babacauh n’avait pas déposé de candidature à la direction de son parti

Allez-y demander au secrétariat général s’il n’a pas délivré de récépissé à Babacauh. Le dépôt se fait dans les délégations départementales. Babacauh fait partie de la délégation PDCI de Bondoukou II. Il y avait les ministres Yao Kouman Alphonse, Adou Kouadio. Il y avait aussi d’éminents cadres du PDCI. Ils ont siégé ensemble à Tabagne. Babacauh est le seul candidat de la délégation de Bondoukou II. Nous interpellons le Président Bédié à réagir afin de ramener la cohésion au sein du PDCI. Le choix des populations doit être respecté.

Propos recueillis par Ange Kouman




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