L’Obi dom bié : un des groupes de danses les plus connus de la région de Gontougo. La renommée de cet « orchestre philharmonique » version traditionnelle brong (abron) est allée au-delà des frontières régionales et nationales. Un succès redevable à des personnes qui ont donné à la troupe toute sa noblesse. Dans cette interview, Taki David, le porte-parole, revient sur les premiers pas de cette danse « mythique ». Dans un langage aussi clair que limpide.
Qu’est-ce que l’Obi dom bié ?
« Obi dom bié » signifie la grâce d’un bienfaiteur. Nous avons choisi ce nom pour dire merci à un bienfaiteur, lui exprimer ainsi notre reconnaissance. L’Obi dom bié est un groupe de danse créé en 2000 par une dame. Il compte près de 80 membres dont une soixantaine de femmes.
Comment vous est venue l’idée de créer le groupe ?
Il faut dire que les Brong d’ici et ceux du Ghana sont frères. Nous partageons la même culture avec les mêmes us et coutumes. Mais au niveau des danses, nous n’avons pas conservé grand-chose. Lors des funérailles de notre chef de village, Nanan Kouakou Krémé, un groupe de danses de la ville de Sunyani au Ghana a été invité. Vu la beauté de ces danses, nous avons décidé de les imiter en mettant sur pieds notre propre troupe artistique. Pour résumer, la création de l’Obi dom bié est partie du constat de la disparition de nos danses culturelles.
Avez-vous créé alors ce groupe pour venir en soutien au Dénké dénké que nous connaissons ?
Non, pas vraiment ! Plusieurs danses se pratiquent ici. Seulement avec l’avènement du groupe Obi dom bié, nous avons regroupé toutes ces danses et nous avons appris les rythmes qui vont avec. Dans le groupe Obi dom bié, on retrouve 5 danses : le Dénké dénké, l’Adowa, le M’Bidri, le Kété et le Fontômfrôm. Après les funérailles du chef de village, nous avons approché nos frères ghanéens et nous leur avons demandé de venir nous apprendre tous les rythmes de ces danses. Et comme dans notre groupe nous avons des élèves, ces derniers vont à Sunyani pendant les vacances pour se perfectionner.
Vous dites que vous avez dans vos rangs des élèves. Comment gérez-vous le vide qu’ils créent avec la rentrée des classes ?
Oui, c’est difficile ! Mais nous sommes sollicités le plus souvent les week-ends, c’est-à-dire du vendredi soir au dimanche. Cependant, lorsque nous avons des contrats ou des sollicitations en semaine, nous prions les responsables d’écoles de libérer nos danseurs élèves. Nous profitons pour dire à ces responsables d’écoles pour leur compréhension et leur soutien.
Il se raconte qu’il y a une division au sein du groupe. Qu’en est-il ?
C’est faux. Il n’y a aucune division parmi nous. Ce sont des rumeurs. Il y a 2 troupes ici à Assuéfry : Obi dom bié et Nyame tyassi. C’est vrai que certains de nos danseurs des ont rejoint le groupe NyameTyassi. Mais les gens interprètent mal cela. Obi dom bié reste toujours uni et solide. Ses membres s’entendent très bien avec ceux de Nyame Tyassi.
Si vous vous entendez si bien, pourquoi avoir refusé de jouer ensemble l’an dernier, lors de la fête de la Fraternité ?
L’an passé, vous aviez demandé que nous fusionnions pour venir à la manifestation. Selon vous, vous auriez un souci d’argent pour louer les 2 troupes. Après consultation de nos membres, la majorité a souhaité qu’on ne participe pas, vu que cela ne nous arrangeait pas. Nous vous l’avions notifié d’ailleurs. En fusionnant les 2 groupes, on travaillerait à perte. Cela ne veut pas dire qu’il y a des problèmes entre nous. Que les gens arrêtent de dire n’importe quoi !
Obi dom bié est un groupe à succès, vu que vous voyagez beaucoup !
On peut dira ça, oui ! C’est le seigneur qui a sa grâce sur nous.
Parlez-nous un peu de votre parcours !
Nous avons fait beaucoup de tournées dans le pays. Nous avons participé à presque tous les festivals. Nous avons remporté de nombreux prix. Nous sommes allés en Corée du Sud où le groupe a représenté la Côte d’Ivoire à un festival.
Pouvez-vous nous parler de vos tournées ?
Je parlerai des sorties qui ont marqué le groupe et les prix importants remportés.
En 2001, nous étions à Aboisso aux obsèques d’Ellingan Etché avec le ministre Kobenan Kouassi Adjoumani. A partir de là, les invitations aux festivals se sont enchaînées. Nous avons pris une part active à toutes les éditions du Festival des danses traditionnelles du Zanzan à Bondoukou. Les éditions 2007 et 2009 nous ont consacrés lauréat. Nous avons représenté le pays en Corée du Sud en 2010. Nous avons fait l’ouverture d’un festival à Gagnoa, chez les Bété. En 2011, la ville de Korhogo a accueilli notre groupe à l’occasion des Vacances cultures. La liste est longue.
Vous êtes célèbre et on peut donc penser a priori que vous vivez de votre art. N’est-ce pas ?
Nous assurons notre pitance quotidienne et nous arrivons à subvenir aux besoins de nos familles. La moitié de nos gains sert à l’achat de notre matériel manquant ou défectueux : pagnes, colliers, appareils, etc.
Les rythmes et les pas exécutés par vos danseurs, la gestuelle et l’habillement ont-ils une signification particulière ?
Le royaume brong est un royaume de noblesse. Ces danses et les habits qui vont avec que le groupe Obi dom bié montre renferment une bonne somme de sens. Chaque danse et chaque pas, chaque habillement a une signification. Comme je l’ai dit, 5 danses se retrouvent au sein du groupe. Certains s’accompagnent de chants et d’autres, non. Les pas sont exécutés aux seuls sons des tam-tams.
Sont-elles alors des danses d’initiation ?
Non, pas du tout !
Propos recueillis par APPIA HERVÉ